Déchiffrage des maladies multifactorielles : cas des mortalités de l’huître Depuis 2008, des mortalités récurrentes et massives affectent le naissain d’huîtres creuses Crassostrea gigas. Pour identifier un moyen de sortir de cette crise sanitaire et trouver les solutions d’une aquaculture durable […]

Thématique : Autre | Localisation : Autre | Filière : Pêche

Contexte

Déchiffrage des maladies multifactorielles : cas des mortalités de l’huître

Depuis 2008, des mortalités récurrentes et massives affectent le naissain d’huîtres creuses Crassostrea gigas. Pour identifier un moyen de sortir de cette crise sanitaire et trouver les solutions d’une aquaculture durable de l’huître, il est nécessaire de déchiffrer ce pathosystème complexe.

C’est dans ce contexte que le projet DECIPHER propose de développer un programme de recherche multidisciplinaire intégré mettant en relation les différents niveaux de compréhension de la maladie. Il se concentre sur l’étude dynamique de l’« holobionte huître » (hôte et microbiote associé, y compris les agents pathogènes) et intègre le fond génétique de l’hôte, les variations de l’environnement et l’histoire des interactions entre les protagonistes de ce pathosystème et l’émergence de la pathologie.

Les objectifs du projet DECIPHER sont donc de contribuer à notre compréhension de la dimension multifactorielle (agents infectieux, microbiote, génétique) de la maladie de «mortalité estivale» affectant les huîtres et de proposer des stratégies de lutte adéquates et efficaces.

Objectifs

contribuer à notre compréhension de la dimension multifactorielle (agents infectieux, microbiote, génétique) de la maladie de «mortalité estivale»

proposer des stratégies de lutte adéquates et efficaces

Actions

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, le projet DECIPHER propose un cadre collaboratif et un ensemble d’expériences capables de s’attaquer aux principaux problèmes scientifiques et techniques non résolus.

Le principal obstacle rencontré jusqu’à présent pour comprendre la mortalité des huîtres était la complexité de ce pathosystème et l’absence de modèle expérimental permettant de démêler les facteurs impliqués. C’est pourquoi jusqu’à récemment, seules des études corrélatives utilisant un nombre limité de facteurs choisis arbitrairement étaient possibles, rendant l’interaction entre tous les facteurs difficile à étudier.

Seul un programme de recherche intégrative utilisant un modèle expérimental d’infection capable de reproduire la pathogenèse dans des conditions contrôlées pourrait relever ce défi difficile. Le développement récent (2013) d’un tel modèle expérimental de pathogenèse (EMP) nous permettra pour la première fois

  • de briser ces limites conceptuelles et techniques
  • d’évoluer vers une vision intégrative et dynamique de la pathosystème dans lequel tous les paramètres peuvent être contrôlés.

De plus, DECIPHER bénéficiera de l’émergence récente et des progrès constants réalisés dans le séquençage de nouvelle génération (NGS) et les méthodes analytiques associées. Il est désormais possible de suivre la dynamique des holobiontes et la réponse fonctionnelle de chacun des partenaires de l’interaction (huître, microbiote, pathogènes) tout au long du processus depuis le début du protocole jusqu’à la pathogenèse. Ensemble, EMP et NGS nous donnent aujourd’hui l’occasion unique d’étudier et de quantifier l’influence respective du statut génétique de l’huître, du microbiote et de l’histoire du challenge microbien (au cours de la vie ou de l’ontogenèse) sur l’émergence de la pathologie

Résultats

Nous avons montré que le POMS était une maladie polymicrobienne. Le virus OsHV-1 est responsable d’une infection précoce qui altère les capacités immunitaires des huîtres en ciblant les hémocytes (cellules immunitaires des huîtres). Cette immunosuppression induite est suivi d’une déstabilisation du microbiote des huîtres dont le point d’orgue est une entrée de pathogènes bactériens opportunistes qui provoquent une septicémie qui sera fatale pour les huîtres. Les mécanismes par lesquels les bactéries pathogènes agissent sur les huîtres ont également été élucidés : nous avons pu montrer notamment de certaines espèces de vibrions étaient capables de lyser les hémocytes affaiblis par le virus. Par ailleurs, nous avons pu établir que les huîtres résistantes étaient capables de mettre en place une réponse antivirale plus précoce, permettant de contrecarrer le développement viral et bloquer les étapes ultérieures de la maladie. Enfin, nous avons pu mettre à jour qu’une exposition précoce des larves d’huîtres à une flore microbienne riche durant leur développement leur permettait d’améliorer leur résistance lors d’une exposition ultérieur à la maladie.