La seiche de Manche est une des espèces exploitées les plus importantes pour les pêcheurs français et britanniques en Manche. L’intérêt pour cette espèce en Manche a commencé dans les années 1980 lorsque la demande et les prix au débarquement ont fortement augmenté. Depuis le début des années 1990, le total annuel de ces débarquements est ainsi en augmentation régulière. Avec un débarquement moyen annuel de 10 000 tonnes pour un chiffre d’affaire moyen annuel d’environ 15 millions d’euros (sur la période 2000-2008), la seiche fait partie des trois ressources démersales les plus importantes pour les pêcheurs français de Manche. Cette ressource est partagée avec les pêcheurs britanniques qui débarquent chaque année environ 4 000 tonnes de seiche pour un chiffre d’affaire annuel moyen de 5 millions d’euros. La seiche de Manche constitue ainsi le stock le plus important de Céphalopodes de l’Atlantique N-E. Cette ressource est exploitée par différentes flottilles de chalutiers hauturiers et côtiers, de caseyeurs et de fileyeurs.
Mais la seiche de Manche, comme l’ensemble des Céphalopodes européens, ne fait pas partie des espèces gérées au niveau communautaire. Ceci est dû au manque d’outils permettant un diagnostic de l’exploitation “en routine”. Pourtant des travaux de recherches ont permis des évaluations ponctuelles.
Durant les 15 dernières années, plusieurs exercices de modélisation du stock de seiche de Manche ont été réalisés et ont fait l’objet de publications scientifiques. C’est ainsi l’un des stocks de Céphalopodes les plus étudiés dans l’Atlantique N-E. Un premier modèle de déplétion a été développé (Dunn, 1999) mais l’hypothèse de capturabilité constante de ce modèle n’était pas adaptée pour modéliser la dynamique de la population de seiche qui est une espèce migratrice. Par la suite une adaptation de l’analyse de population virtuelle (VPA) sur un pas de temps mensuel a été réalisée (Royer et al., 2006) mais les difficultés rencontrées dans l’estimation de l’âge des individus (ou le temps que cela prend) rendent difficile l’utilisation en routine de cette VPA. Dans de tels cas, l’utilisation d’un modèle de biomasse à 2 stades a permis d’obtenir des résultats plus satisfaisants sur des espèces à durée de vie courte telles que le calmar “Chokka” d’Afrique du Sud ou le hareng de Mer d’Irlande (Roel et Butterworth, 2000 ; Roel et al., 2009).
Un modèle de biomasse à 2 stades pour la seiche de Manche a donc été développé dans le cadre d’un projet de recherche (Thèse de Michaël Gras en cours et présentation Gras et al., 2011). Ce dernier modèle fournit un indicateur : le taux d’exploitation. Afin de généraliser l’émission de diagnostics, le groupe de travail CIEM pour l’étude des Céphalopodes et de leurs traits d’histoire de vie (WGCEPH) recommande l’utilisation d’indicateurs d’état d’exploitation du stock (Anonyme, 2012). Le modèle de biomasse à 2 stades permet d’estimer le taux d’exploitation (pourcentage de la biomasse capturée dans une saison de pêche). Sur l’ensemble de la série de données étudiée, ce taux d’exploitation suit les variations interannuelles du recrutement mais reste pour l’instant stable à long terme (sans tendance significative).